Visite de courtoisie.

Le jour se lève lentement, à l'Est, comme il a l'habitude de le faire, avec une banalité déconcertante. Il répand ses lumières sur le monde paresseusement, et éclaire les vies des hommes sans s'en rendre compte.

Sur la plaine, devant la forêt, pas un mouvement encore. Les hommes attendent un peu que tout soit sûr avant de sortir pour s'aventurer si près de la forêt de la Meute.

Une silhouette, pourtant, est sur la plaine, a une trentaine de pas de l'orée du bois. Une silhouette qui n'était pas là l'instant auparavant, et qui semble être apparu de nulle part.

Le visage du personnage se tourne vers les fourrés, et attend.

L'air calme, l'elfe s'assoit en tailleur sur l'herbe, tranquillement, et observe les mouvements devant lui.

L'éternité lui appartient. S'ils veulent bien le recevoir, un signe arrivera. Sinon.... Tant pis.

Le nain était resté immobile de longues minutes. Ses hommes sont dans les bois. Ah non, deux sont dans l'arbre à gauche... Sans compter ceux alongés dans les fourés. Pas fou, le bonhomme... Pour le gars assis dans l'herbe, là-bas, le temps semble inexistant. La chance...

Le Duc consent enfin à s'avancer, lentement, à travers les quelques mètres d'herbes sauvages, passant sur un tapis de feuilles mortes, encore pleines de rosée. Il s'avance, s'avance jusqu'à se placer à une vingtaine de pas du nouveau venu. Bon, les gardes noirs ne doivent pas être loin. J'éspère que Hozz à retenu quelques rénégats, histoire de nous soutenir, au cas-ou. Bah, Elle doit veiller sur moi de toute façon...

Le nain s'installe dans une position confortable, mordillant une brindille.

"C'est pour quoi ?"

Celimbrimbor sourit doucement en entendant le nain. Inclinant délicatement le buste, il lui répondit :

"Bonjour, Maître Nain. Je me nomme Celimbrimbor, et je viens juste vous rendre une visite de courtoisie, pour en apprendre un peu plus sur vous, vos motivations, et tout ce qui concerne votre ordre, afin d'engager, peut-être, des rapports de bonne entente.

Quoiqu'il en soit, ne craignez rien de moi, je ne viens pas en guerre."

Son sourire est plutôt honnête de même que son visage, et il attend une réponse du Duc.

Entendant ces dernières paroles, le Duc sourit, jettant de brefs coups d'oeil, à peine perceptibles, aux buissons du côté de ce visiteur. Il jeta parresseusement sa brindille et macha le dernier bout coincé entre deux dents.

"Il y a une abaye pour parler. C'est moche, froid, mais c'est là que l'on parle.
Nous pouvons y aller, si vous préférez..."

Puis dans un long soupir, le nain s'étendit de tout son long, ajustant ses mains derrière sa tête en guise de coussin.

"Une abbaye? Pourquoi pas, sire Nain. Mais je pourrai aussi faire naître ici une place plus belle encore, si l'envie vous en prend."

Celimbrimbor se lève.

"Passons... Je vais donc vous suivre dans un lieu plus propice aux discussions."

Amicalement, il tend la main :

"Si vous voulez bien me montrer le chemin." Dit-il dans un sourire non feint.

L'allongé se leva, ignorant la main tendu. Il s'éssuya rapidement le manteau, laissant découvrir son interieur : une armure gravée de divers beaux motifs. Des places encore plus belles ? Et puis quoi encore...
Un homme arriva alors. Une sorte de grand gaillards vêtu comme un milicien. Il portait une sorte de grande hallebarde, mais ne s'en servait que comme d'un baton. Il stoppa sa marche à quelques pas du Duc et s'inclinna bien bas. Puis il s'approcha et soufflota quelques mots dans l'oreille du nain. Celui-ci ne sembla apprécier cette élan de familiarité, mais n'en dit rien. Il se tourna vers le visiteur et déclara, d'une voix lasse.

"J'ai honte de dire ça, mais il faut nous pardonner. On me dit que les ruines ne sont actuellement pas accessibles. Mais peut-être pourriez vous créer ici un petit lieu sympathique. Attention, je ne veux pas de palais ou de superbe place colorée. Si vous pouviez nous faire deux bons vieux fauteilles, et peut-être un table, sans rien d'autre que cette étendue d'herbe, cela serait parfait."

Il afficha un sourire faussement chaleureux et attendit, les bras croisés, de voir l'inexpicable arriver.

Celimbrimbor regarde son interlocuteur un instant, puis, sans faire de geste autre qu'un simple murmure, il regarde une table massive et ronde se matérialiser devant eux, ainsi que deux fauteuils confortables, mais pas trop, pour ne pas sombrer dans la somnolence.

Sur la table, deux verres, dont un rempli d'eau, ainsi qu'un pichet vide.

"Vous souhaitez un peu de nourriture avec? Ah! Et que buvez-vous comme alcool?"

Toujours avec un sourire malicieux, Celimbrimbor attend que le nain veuille bien s'asseoir, dissimulant une exclamation de surprise devant l'armure du nain.

Au départ douteux, puis plus détendu, le Duc consentit à s'assoir. Le fauteuil était assez confortable, très confortable même, mais bien entendu, le Duc n'en montra point signe. Il posa une main à plat sur la table et chercha sa pipe de l'autre. Une fois sortie et allumée, elle alla se placer entre deux lèvres.

"Non. De l'eau."

Il attendit, s'apprêtant à voir son verre se remplir d'eau tout seul.

Le verre ainsi que le pichet se remplissent d'eau. Plutôt, l'instant d'un clignement d'oeil, l'eau se retrouve dans les deux récipients.

"Or donc, puis-je en apprendre plus sur vos motivations, Messire? Jolie armure, au demeurant."

Celimbrimbor sourit, détendu, et se plonge dans le fauteuil.

S'amusant du spectacle de son verre en train de se remplir, le nain rabattit les côtés de son manteau, de façon à masquer son armure. Il vida lentement le verre et reposa son regard sur l'homme.

"Nos motivations ?"

Sourit.

"J'imagine que vous voulez parler ce celles de la Meute en général ? Et bien... J'éspère que personne ne vous a parlé d'organisation quelconque. Car la Meute n'en n'est pas une. La Meute, est l'union de quelques personnes, peut-être partageant les mêmes antécédants, les mêmes rancunes, les mêmes haines..."

Marque une pause.

"L'histoire de la Meute est longue. Vous ne venez que pour cela ?"

Celimbrimbor hoche la tête mystérieusement.

"Vous voudrez bien pardonner à un elfe de mon âge de s'intéresser aux histoires... C'est la seule chose qu'il me reste.

Mais, avant toute chose, vous dîtes vous appeler la Meute... Cela signifie-t-il que... Si l'on vous le demande, vous pourriez... Être laché sur une cible? Sur une piste? Excusez-moi de vous demander cela aussi abruptement, mais voyez-vous, j'aime beaucoup les mots, et leur sens... Donc...

Quoiqu'il en soit, c'est votre histoire que je suis venu écouter. Car j'aime ça, et parce qu'il faut bien que quelqu'un la connaisse, outre vous. Pour que votre nom résonne dans les légendes. Moi, je suis plus humle, c'est dans les rumeurs que je mettrai le votre, dans les souffles de vent, dans les brises légères qui précédent le combat.

Voilà mon terrain. Voulez-vous m'aider à l'agrandir?"

Celimbrimbor sourit encore, et attend.

Le Duc fut véritablement intrigué par les dires de cet elfe... D'abbord par la façon dont il avait prétendu ne garder que les histoires, alors qu'il déployait d'aussi importants pouvoirs. Puis aussi par cette curiosité mordante, cette petite envie d'assimiler, puis de répandre. Souriant, il répondit, calmement :

"La Meute... La Meute se fait appeller comme cela en rapport aux loups, et aux autres animaux libres de ce monde. Les liens de fraternité alliant les membres de la Meute sont forts, au moins autant que celui qui unirait une harde de loup. Et... Il y a aussi un rapport avec Sihr Hozz, mais vous lui demanderez en personne, ce serait... Mieux placé.
Par contre, l'idée de nous "lacher" sur quelqu'un ou quelque chose est vraie et fausse. Nous ne sommes pas des mercenaires, nous suivons nos propres envies, nos propres décisions. Nous ne sommes pas non plus corruptibles, je refais là référence aux liens nous unissant... Mais nous sommes- du moins j'aime à le penser -imprévisibles, et quand nous choisisson une cible, acharnés."

Il fit une pause, le temps de se resservir en eau.

"Je ne suis pas spécialement lié au loups, personnellement, mais j'accorde une énorme importance à la Terre, à la Nature... Mais si c'est de la Meute que vous voulez parlez, continuez vos questions. Mes intentions propres... sont un autre sujet."

"Des liens aussi fort que ceux d'une meute de loups... Intéressant, vraiment.

Libre, uni, rapide? Fort bien, fort bien... Mais d'où vous vient cette unité? Comment vous-êtes vous rencontré? Quel hasard? Quel destin?
Croyez-vous, d'ailleurs, à ce destin?"

Conscient de déchaîner une avalanche de question impolie, Celimbrimbor s'interrompt, le temps de se calmer.

"Pardonnez, je vous prie, cet emportement. Je n'ai pas encore appris la prudence, malgré les années." Il ponctue cette délcaration d'un rire amical. "Cependant... Cependant oui, le thème récurrent, c'est la Nature, sauvage, instinctive... Je ne veux pas dire que vous n'agissez que par instinct, non, je vous suppose bien au delà de ce stade, mais... seriez-vous des druides? Des mages de la nature?

Je suis à la recherche de tout savoir, de toute connaissance. Et vous m'offrez là un appat très intéressant."

Il se renverse dans son fauteuil; et croque une pomme qui vient d'apparaître dans sa main.

N'ayant pas encore l'habitude de ces apparences magiques, le Duc essaya tout bonnement de ne plus y prêter attention. Il rangea l'amulette qu'il portait autour du cou sous son armure et continua.

"Le rapport avec la nature s'est fait tout naturellement. Le caractère des membres de la Meute et le contact de Hozz avec les loups ont bien sûr eu leur impact. Pour ce qui est du druidisme, ou autre lien magique avec cette même nature, je dirais que non, bien que pas forcément au courant des pratiques de tous... Cette "relation" avec la Terre, m'est propre..."

"Une relation à la terre?"

Celim hausse les sourcils, intéressé.

"Quelle est-elle? Est-ce elle que vous nourissez aisni par des sacrifices?

Pardonnez encore mes questions, mais... Je meurs d'envie de savoir.
D'un autre côté... Sirh Hozz? Avez-vous une hiérarchie?
Qu'est-ce qui vous pousse à avancer?"

Affamé de savoir, les yeux brillants, Celim regarde le nain.

Le Duc toussota légerement.

"Je ne divulguerais pas ces informations. Pour le Sihr, non, nous n'avons aucune hierarchie, juste une forme de respect. Pas de respect des anciens, des forts ou des spéciaux, mais simple respect de relations. Je connais Hozz depuis... Assez longtemps, aussi ais-je autant de respect pour lui que j'en aurais pour un maitre de guerre, à l'exception près que je ne supporterais pas le fait d'être commander."

Il se fit craquer les doigts.

"Par contre, je ne comprends pas bien votre question. Ce qui nous pousse à avancer ? Je dirais que cela dépend des buts que nous nous fixons, des cibles que nous choisissons. Unis par nos liens, nous nous pousson chacun les uns les autres pour ne jamais donner que le meilleur que soit même, pour tout se que nous entreprenons."

Le nain se passa la main sur le menton, songeur.

"J'espere que je suis clair, n'hésitez pas à poser des questions plus précises."

Celimbrimbor fait un geste de la main pour écarter tout ça.

"Des questions plus précises?

Hum, ce que je veux dire, c'est qu'est-ce qui vous pousse, vous, à avancer? Le désir de survivre? est-ce pour ça que la meute existe, parce qe l'union fait la force? Ou bien pour autre chose?

Êtes-vous en quête d'une chose particulière? Y'a-t-il un dessein particulier à la Meute? Un sous-bassement? Je vous demande ça, parce qu'au cours des temps, j'ai appris qu'ici, rien n'était du au hasard..."

Un homme munit d'une grande hallebarde, le même qui était déjà venu, arriva, pas moins essoufflé que la dernière fois. Le Duc prit grand soin d'écouter jusqu'au bout son interlocuteur avant d'enfin se tourner vers l'humain. Il hocha la tête, l'incitant à parler. Mais jetant des regards suspects au Consul, cet homme préféra s'approcher de l'oreille du Duc, pour lui chuchotter son message.
Le Duc se leva alors.

"Sire, d'autres m'appellent. Désolé pour ce départ, et merci pour tout cela."

Il s'inclinna très légerement avant de suivre l'halbardier, qu'il n'appréciait pas du tout.

Celimbrimbor regarda le Duc s'éloigner, et fit disparaître fauteuils, table, et le reste.

Il resta un long moment à flotter dans l'air, avant de disparaître à son tour.

Affaire à suivre, sans doute.